Deux champignons jusque-là inconnus en Europe observés dans notre Jardin !

Deux champignons originaires d’Amérique du Sud et jusqu’alors inconnus en Europe ont été découverts dans notre Jardin par notre Conservateur Juan Carlos Zamora!

C’est une découverte des plus inattendues et à laquelle notre conservateur et spécialiste des champignons Juan Carlos Zamora ne s’attendait pas !  En 2022, alors qu’il procède avec une étudiante stagiaire de l’Université de Genève à l’échantillonnage de ce qu’il croit être un champignon « rouille » commun afin de l’observer au microscope, il va vite se rendre compte que ce qu’il a ramassé est loin d’être ce qu’il croit.

D’apparence externe, le champignon ramassé ressemble en effet à s’y méprendre à l’espèce commune Puccinia malvacearum répandue dans toute l’Europe. Mais lorsqu’il l’observe de plus près au microscope, cette ressemblance n’est plus si évidente.

« L’objectif était d’observer au microscope cette espèce commune de rouille – un champignon phytopathogène qui colonise des plantes de la famille des Malvaceae et qui tire son nom de sa couleur orangée – avec notre stagiaire. Je m’attendais donc à voir des spores bicellulaires, or ce sont des spores unicellulaires qui apparaissent. La première chose qui me vient à l’esprit est que nous avons mal préparé notre échantillon : je recommence l’opération et observe à nouveau des spores unicellulaires. Et là, je me dis que j’ai trouvé autre chose que je ne connais pas » explique Juan Carlos Zamora. 

Une première découverte qui en amène une autre

Notre conservateur se plonge alors dans les écrits scientifiques afin de trouver ce que l’on appelle une clé d’identification lui permettant de déterminer ce qu’il observe et découvre que ce qu’il a ramassé est une autre espèce originaire d’Amérique du Sud et jusqu’alors inconnue en Europe : P. platyspora

Il retourne alors dans le Jardin pour collecter un autre exemplaire de ce qu’il pense maintenant être cette rouille appelée P. platyspora et l’étudier à nouveau au microscope. Et là, surprise, il observe des spores bicellulaires qui indiquent qu’il a, à nouveau, trouvé autre chose ! 

« Je me plonge donc à nouveau dans la littérature à la recherche de clés d’identification me permettant de comprendre ce que j’ai collecté et conclu que ce que j’ai trouvé est une autre espèce appelée P. modiolae, également originaire d’Amérique du Sud et également inconnue jusqu’à présent en Europe ! »

Collaboration avec l’ETH Zürich

Juan Carlos Zamora partage sa découverte avec ses collègues mycologues de l’ETH Zürich Reinhard Berndt et Mónica García Otálora avec lesquels il collabore dans un projet de recherche sur les rouilles.

En 2023, avec un autre étudiant de l’Université de Genève Mathias Angulo, ils vont résoudre l’énigme ce des deux découvertes en collectant des échantillons à Genève, en France voisine ainsi qu’à Zürich et en faisant venir un échantillon d’Allemagne que Juan Carlos Zamora a identifié sur la plateforme iNaturalist

Confirmation génétique

Les analyses génétiques des échantillons récoltés confirment qu’il s’agit bien de trois espèces distinctes : l’espèce commune P. malvacearum déjà connue en Europe, ainsi que P. platyspora et P. modiolae qui n’avait jusqu’alors pas été identifiées sur ce continent. La recherche montre d’ailleurs qu’à Genève, sur la plante cultivée « Alcea rosea », 95% de ce que nous pensions être l’espèce commune est en fait P. platyspora. » 

« Ces résultats ont fait l’objet d’une publication scientifique qui nous a permis de présenter notre recherche et la présence en Europe de ces deux espèces de champignons rouille » explique Juan Carlos Zamora. 

« Ce projet a également permis à Mathias Angulo de s’initier à la recherche scientifique au travers de l’échantillonnage, des analyses morphologiques et génétiques, et la présentation de nos résultats dans une publication scientifique ».