Code de nomenclature – une mise à jour attendue
L’heure est venue pour le Code international de nomenclature pour les algues, les champignons et les plantes d’être remis à jour. Chaque 6 ans, ou presque, depuis plus de 150 ans, les botanistes, bryologues et mycologues se réunissent pour discuter et se mettre d’accord sur les règles qui dictent la manière dont les plantes doivent être nommées et officiellement publiées pour être acceptées par la communauté scientifique internationale. Une délégation des nos scientifiques se joignent aux discussions
Du 21 au 27 juillet, Madrid s’apprête à accueillir le 20e Congrès International de Botanique (International Botanical Congress – IBC), durant lequel les chercheuses et chercheurs du monde entier se réunissent pour présenter, discuter et échanger au sujet de leur travaux de recherche. De la classification à la conservation en passant par la biogéographie, la génétique, l’évolution, les plantes invasives ou les changements environnementaux, de multiples thèmes sont abordés. Tous jouent un rôle crucial pour améliorer nos connaissances et notre compréhension du monde végétal et fongique afin de mieux le protéger.
En marge de ce congrès – la semaine qui précède – se tient la Session Nomenclaturale, où les discussions et décisions d’amendement du Code international de nomenclature pour les algues, les champignons et les plantes sont prises.
Un ouvrage de référence continuellement actualisé
Le Code regroupe l’ensemble des règles et des recommandations qui régissent et guident la dénomination scientifique de tous les organismes traditionnellement considérés comme des algues, des champignons ou des plantes, ainsi que les décisions relatives aux processus de publication.
On y retrouve par exemple les règles relatives à la nomenclature binomiale de Linné, imposant l’utilisation d’un genre et d’une épithète spécifique en latin (langue internationale officielle), la règle de priorité pour départager des noms différents donnés pour une même espèce (synonymes) ou l’interdiction d’utiliser le même mot pour le nom de genre et l’épithète spécifique (tautonyme) et bien d’autres encore!
Comme la compréhension de l’application des règles et des recommandations évolue, l’applicabilité et la pertinence de ces règles sont affinées en permanence. En outre, les changements et les innovations technologiques (par exemple, les publications électroniques ou les progrès du séquençage génétique) entraînent une modification des pratiques scientifiques qu’il convient de prendre en compte. C’est pourquoi le Code est revu chaque 6 ans environ (cela peut fluctuer en fonction des aléas historiques), pour refléter ces évolutions et demeurer une référence d’actualité. Chaque nouvelle édition remplace la précédente.
Un processus démocratique
D’un congrès à l’autre, toutes les propositions d’amendement du Code sont publiées dans la revue scientifique Taxon de l’International Association for Plant Taxonomy (IAPT), dédiée entres autres à la nomenclature. Elles sont ensuite compilées pour constituer une publication de synthèse quelques mois avant le Congrès, également publiée dans Taxon. Cet article constitue la base des discussions.
Un premier vote préliminaire indicatif est ensuite organisé pour sonder les membres de l’IAPT, les auteurs des propositions et les membres des comités permanents de nomenclature de l’IAPT et renseigner les tendances. Certaines propositions de modifications sont ainsi directement écartées si elles sont d’ordre purement éditoriales ou si elles ont récolté au moins 75% de votes négatifs durant ce premier tour indicatif.
Les propositions restantes sont décortiquées et discutées, puis acceptées ou rejetées à l’issue d’un vote démocratique. Les résultats sont enfin présentés à la session plénière de l’IBC pour ratification.
Ces 7 dernières années, 433 propositions ont été soumises et 132 propositions ont directement été rejetées durant le vote préliminaire. Il reste donc 301 propositions à évaluer durant la semaine du 15 au 19 juillet, à Madrid.
A noter que les propositions concernant l’article F du Code dédié à la nomenclature des champignons constituent des sujets beaucoup plus complexes et spécifiques et sont traitées indépendamment durant le Congrès International de Mycologie, prévu cette année à Maastricht à la mi-août.
Une délégation genevoise… mais pas seulement!
L’herbier de Genève représente l’une des plus importantes collections au monde et constitue la base de travail pour les taxonomistes de notre institution et du monde entier. Nous publions aussi deux revues scientifiques, Candollea et Boissiera. De ce fait, il est important pour nous de participer aux décisions de la communauté scientifique en matière de nomenclature qui influencent directement nos pratiques de travail en taxonomie et en édition scientifique.
Notre délégation présente à la Session Nomenclaturale est constituée de Michelle Price, Martin Callmander, Joel Calvo et Juan Carlos Zamora. Ils représenteront notre institution en portant les votes individuels et institutionnels et porteront également, par délégation, les votes d’autres institutions suisses, suédoises et espagnoles.
La Session Nomenclaturale est également une parfaite opportunité pour nos scientifiques d’échanger avec des paires sur des sujets clés de la nomenclature botanique et établir des collaborations dans une discipline qui reste complexe.
Un code aux origines genevoises
Le premier Code fut initialement élaboré par Alphonse de Candolle, fils de notre fondateur, Augustin-Pyramus de Candolle, qui le rédige tel un ouvrage juridique, rappelant sa formation de droit.
En 1867, Alphonse convoque une assemblée de botanistes de plusieurs pays pour mettre au point un nouvel ensemble de règles de nomenclature et organise ainsi le premier Congrès international de botanique à Paris qui aboutit à la publication des Lois de nomenclature botanique.
Certaines éditions ont été traduites en plusieurs langues, comme la dernière version du Code de Shenzhen, traduite en français, ici, à Genève.